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Claude-Camille Perret to Johann Gottlieb Fichte

Rastadt le 26. Ventôse an 6. (1798.)
Le Citoyen Harbauer, qui Vous remettra cette lettre, mon cher Fichte, s’est engagé de solliciter près de Vous le pardon de mon inexcusable négligence. L’amitié qu’il m’a dit, que Vous conserviez encore pour moi, me fait espérer que, considérant le tourbillon, dans lequel je me trouve depuis 18 mois, Vous serez indulgent envers un jeune homme, qui [rassuré] sur Vos sentiments pour lui, s’efforcera de Vous prouver, qu’il en est toujours digne.
Les gazettes Vous ont appris à peu près tout ce qui m’est arrivé depuis mon départ pour l’Italie, jusqu’à mon arrivée à Rastadt. Mais Vous ignorez sans doute ce qui a précédé. – – – Cependant j’ai été sur le théatre de nos plus éclatantes victoires, et j’y ai pu connaître un grand citoyen. Tel est [Bonaparte]; j’ai appris de Vous de ne pas juger légèrement, et je l’ai vu sous tant de rapports, que je n’ai pu me refuser d’unir ma voix à celle de toute l’Europe. Depuis le rappel du Général, auquel le Gouvernement m’avoit d’abord attaché, je suis devenu le Secrétaire diplomatique de Bonaparte, et c’est en cette qualité, que je reste ici en attendant son retour. Trois mois se sont déjà écoulés depuis son départ; les affaires prennent ici depuis huit jours une allure plus efficace et plus sérieuse. Cependant j’espère toujours qu’il reviendra, et je ne cesserai d’y croire, que lorsqu’il me rappellera à Paris.
Parlons à présent de Vous de la philosophie, de l’humanité germaine. Je sais, que Vous avez eu la douleur, de perdre Votre brave beau-père, mais qu’un petit garçon bien vif et bien libre est venu Vous offrir la plus douce [/] des consolations. Je sais, que Votre énergique amour du bien Vous a suscité des désagrémens, mais que Vous êtes de nouveau aimé et estimé de Vos disciples, autant que Vous avez droit de l’être. – La Philosophie a-t-elle gagné depuis trois ans de nouveaux amis, de nouveaux cultivateurs? Est-il resulté de toutes les recherches l’admission de quelques principes fondamentaux et universels? a-t-on fait des applications utiles et nouvelles? Votre système a-t-il vaincu les oppositions? J’espère que Vous ne laisserez pas ces questions sans réponse: Vous m’éstimez assez pour ne pas douter combien je m’intérésse à une science, dont les progrès et l’universalité forment le vrai charactère de l’humanité. J’ai appris avec plaisir, que les lumières se sont répandues d’avantage encore depuis mon depart de Jena, que plusieurs esprits distingues, que j’avois connu vacillants et 20 presque apostats, ont puises dans le maintien des choses une stabilité qu’ils n’avoient pas. Pour favoriser et accélérer l’impulsion générale, j’ai conçu un projet, qui pourroit recevoir des circonstances présentes une facile exécution. La réunion à la France de la rive gauche du Rhin, en créant un nouveau lien entre les deux nations, doit offrir aux amis de la liberté persécutés en Allemagne un asyle, et préparer l’affranchissement de la Germanie. Nous aussi avons besoin, que la solidité allemande s’allie avec notre impétuosité, et que changeant nos sentiments en principes elle nous retienne sans nous faire rétrogrades. Le moyen le plus efficace et le plus sûr pour atteindre ce double but seroit, je pense, d’instituer sur les bords du Rhin plusieur[e]s écoles, dont les professeurs seroient pris des Allemands, qui réuniroient le plus de connaissance et de talents à l’amour de la liberté. Ce projet est-il exécutable? Veuillez, mon cher F., me confier votre opinion à cet égard. Si votre réponse est affirmative, nous aviserons réciproquement après une convention préliminaire aux moyens de réussir
Votre
reconnaissant ami
C. Perret.
Metadata Concerning Header
  • Date: Freitag, 16. März 1798
  • Sender: Claude-Camille Perret
  • Recipient: Johann Gottlieb Fichte ·
  • Place of Dispatch: Rastatt · ·
  • Place of Destination: Jena · ·
Printed Text
  • Bibliography: Fichte, Johann Gottlieb: Gesamtausgabe der Bayerischen Akademie der Wissenschaften. Abteilung III, Bd. 3: Briefe 1796‒1799. Hg. v. Hans Gliwitzky und Reinhard Lauth. Unter Mitwirkung v. Peter K. Schneider und Manfred Zahn. Stuttgart 1972, S. 114‒115.
Manuscript
  • Provider: Handschrift verschollen
Language
  • French

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